"L'art contemporain est nul" - Partie 1

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Norma
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Norma »

Oui m'est c'est et ça n'a jamais été ni un cas ni l'autre. Le but de l'art n'est pas plus le beau que l'agréable.
Et si on perçoit comme agréable à postériori les oeuvres classiques, c'est simplement parce qu'on a été habitués à les voir de manière positive.
Kefka
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Kefka »

Norma a écrit :Oui m'est c'est et ça n'a jamais été ni un cas ni l'autre. Le but de l'art n'est pas plus le beau que l'agréable.
Et si on perçoit comme agréable à postériori les oeuvres classiques, c'est simplement parce qu'on a été habitués à les voir de manière positive.
Ça se discute, l'art n'est pas l'apanage des artistes, à mon sens.

De plus, je n'avais pas vraiment pour objectif de décrire les fondements de "l'agréable", juste émettre l'idée que des phrases comme "l'art contemporain, c'est nul" faisait une confusion entre l'agréable et le beau. Par ailleurs, je ne suis pas convaincu de l'équivalence que tu fais entre "classique" et "agréable", l'un n'impliquant pas l'autre, quand bien même on serait habitué à voir les "classiques" comme des œuvres positives.
Mizc
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Mizc »

Là dessus je suis d'accord avec Kefkounet.

Il ne faut pas oublier que l'art "classique" avait ses (riches) commanditaires, que l'oeuvre commandée pouvait dans une certaine mesure flatter (on flirte alors avec "l'art agréable" de façon tangente) qui l'avait financée. Simplement, il y avait autre chose qui n'était pas de l'ordre de l'agréable, mais de l'esthétique, et qui le temps aidant s'est peu à peu dissocié de l'agréable. Question d'évolution des idéaux, des idéaux antiques aux idéaux classiques aux idéaux romantiques aux idéaux modernes ... (pour parler rapidement)
Daisy.Adair
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Daisy.Adair »

Norma se contentait simplement de répondre à Nomis, pas d'émettre une équivalence à l'emporte pièce et de la poser comme absolue, ce qu'elle ne peut pas se permettre étant donné son cursus.

Prêchez plutôt les indécis, au lieu des convaincus.
moniiique
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par moniiique »

Bon, la conclusion de tout ça c'est : 4'33 on est sur les dents là ! La suiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiite !
Norma
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Norma »

Kefka a écrit :
Norma a écrit :Oui m'est c'est et ça n'a jamais été ni un cas ni l'autre. Le but de l'art n'est pas plus le beau que l'agréable.
Et si on perçoit comme agréable à postériori les oeuvres classiques, c'est simplement parce qu'on a été habitués à les voir de manière positive.
Ça se discute, l'art n'est pas l'apanage des artistes, à mon sens.

De plus, je n'avais pas vraiment pour objectif de décrire les fondements de "l'agréable", juste émettre l'idée que des phrases comme "l'art contemporain, c'est nul" faisait une confusion entre l'agréable et le beau. Par ailleurs, je ne suis pas convaincu de l'équivalence que tu fais entre "classique" et "agréable", l'un n'impliquant pas l'autre, quand bien même on serait habitué à voir les "classiques" comme des œuvres positives.
Non mais c'était en rapport à ce que disait Nomade :
Avant, c'était d'atteindre le "beau", au sens d'une représentation parfaite ou magnifiée de la nature/vie/réalité (corrige-moi si je me trompe).
Je précisais donc que dans le passé, le but c'était pas d'atteindre le beau. Mais même si tu sépares le "beau" et l'"agréable" bin en l'occurrence et pour répondre à Nomade, peu nous chaut parce que ce n'était pas non plus le but d’être agréable.

Donc par de surinterprétation de mes propos, hein, surtout que j'ai choisi volontairement de rester raz des pâquerettes parce que si j'me suis jamais inscrite en thèse c'est aussi parce que ce genre de discussions me gave admirablement.
Laharl
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Laharl »

OFF-Topic :
[quote="Norma"][quote]Avant, c'était d'atteindre le "beau", au sens d'une représentation parfaite ou magnifiée de la nature/vie/réalité (corrige-moi si je me trompe).[/quote]

Je précisais donc que dans le passé, le but c'était pas d'atteindre le beau. Mais même si tu sépares le "beau" et l'"agréable" bin en l'occurrence et pour répondre à Nomade, peu nous chaut parce que ce n'était pas non plus le but d’être agréable.

Donc par de surinterprétation de mes propos, hein, surtout que j'ai choisi volontairement de rester raz des pâquerettes parce que si j'me suis jamais inscrite en thèse c'est aussi parce que ce genre de discussions me gave admirablement.[/quote]
Euh oui mais non. Dans la théorie néoplatonicienne (oui, c'est Platon, avec plus de poils, dans sa version remastérisé sorti tout droit de l'Antiquité tardive : Plotin) qui gouverne une grande partie de la représentation médiévale (autant en Orient qu'en Occident, mais surtout en Orient), la cherche du Beau (et donc du Vrai) passe par des représentations souvent schématiques qui représentent un monde idéal, c'est à dire qu'une peinture de manuscrit par exemple représente le monde tel qu'il est réellement visible par delà la réalité des choses. C'est donc ça le Beau, une réalité intérieure, mystique, dévoilée par la représentation artistique.
Après je ne sais pas si vous parliez véritablement de la représentation dans le monde antique-médiéval, mais il me semble que c'était le point de départ de Nomade.
Bon, moi je suis un médiéviste, alors les historiens de l'art contemporain, je les regarde passer... ça me rappelle de mauvais souvenirs de certains cours obligatoires en licence.
Norma
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Norma »

Laharl a écrit :
OFF-Topic :
[quote="Norma"][quote]Avant, c'était d'atteindre le "beau", au sens d'une représentation parfaite ou magnifiée de la nature/vie/réalité (corrige-moi si je me trompe).
Je précisais donc que dans le passé, le but c'était pas d'atteindre le beau. Mais même si tu sépares le "beau" et l'"agréable" bin en l'occurrence et pour répondre à Nomade, peu nous chaut parce que ce n'était pas non plus le but d’être agréable.

Donc par de surinterprétation de mes propos, hein, surtout que j'ai choisi volontairement de rester raz des pâquerettes parce que si j'me suis jamais inscrite en thèse c'est aussi parce que ce genre de discussions me gave admirablement.[/quote]
Euh oui mais non. Dans la théorie néoplatonicienne (oui, c'est Platon, avec plus de poils, dans sa version remastérisé sorti tout droit de l'Antiquité tardive : Plotin) qui gouverne une grande partie de la représentation médiévale (autant en Orient qu'en Occident, mais surtout en Orient), la cherche du Beau (et donc du Vrai) passe par des représentations souvent schématiques qui représentent un monde idéal, c'est à dire qu'une peinture de manuscrit par exemple représente le monde tel qu'il est réellement visible par delà la réalité des choses. C'est donc ça le Beau, une réalité intérieure, mystique, dévoilée par la représentation artistique.
Après je ne sais pas si vous parliez véritablement de la représentation dans le monde antique-médiéval, mais il me semble que c'était le point de départ de Nomade.[/ot]
[/quote]

Oui mais tout à fait pour Plotin. j'avais juste envie de vulgariser parce que mes lointains souvenirs d'esthétique me donnaient envie de les refouler :-P
4minutes33
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par 4minutes33 »

Alors alors, la deuxième partie ne viendra pas dans les prochains jours. Ce week-end plutôt je pense, j'ai envie de faire ça bien, et j'ai envie d'être à la fois complète mais pas trop longue. C'est sur ce dernier point que ça va être compliqué. Plein de questions ont été soulevées, je n'ai pas de réponse à tout. Il faut aussi admettre que l'histoire de l'art est une science certes, avec le sérieux que ça implique, mais c'est une science de l'Homme. Par conséquent on peut soulever des questions, on peut jouer avec des concepts mais les choses ne sont pas toujours fixées et tranchées. Ça peut avoir un côté frustrant, parce qu'on est devant des interrogations qui ne sont pas toujours résolues. On peut amener des points d'éclaircissement (c'est plutôt ce que je cherche à faire ici), on peut jouer avec les concepts, on peut poser des questions moins consensuelles mais mon but n'est pas de vous donner une réponse toute faite. Donc quand Nomade tu me dis:
Nomade a écrit :Comment détermine-t-on ce qui est de l'art, et ce qu'est un artiste ?
A qui s'adresse l'art contemporain ?
que recherchent les artistes contemporains ? Quelle est leur but (ou quels sont leurs buts) ?
J'ai envie de te répondre: rien que ça :D ? Bref, ça va être très compliqué de te donner une réponse très simple en deux ou trois lignes qui puisse te satisfaire. Sans doute parce qu'on peut trouver des éléments pour éclaircir ces points, mais qu'il n'y a pas UNE réponse! Mais oui d'accord, on va tenter d'en discuter! C'est un petit peu le but d'ailleurs qu'on puisse en discuter :wink:
moniiique a écrit :Et puis aussi sans doute parce que je me fais cette idée, avérée ou non je ne saurais dire, de l'art en général et du contemporain en particulier comme "investissement" pour de gros richous ignares qui s'en branlent de ce qu'ils achètent du moment que la cote de l'artiste en question est en ascension. Genre investir dans un nom pour spéculer plus tard et se faire du blé en revendant un tableau qu'on n'a jamais regardé pour dix fois le prix d'achat
Bon, bon, bon, et donc cette idée est avérée oui. Ce serait faux de prétendre le contraire. Je n'ai pas une vision assez claire du marché actuel pour estimer à quel point c'est courant mais oui l'art est une valeur refuge et donc ça arrive évidemment que certaines oeuvres soient acquises pour ces raisons plus que pour une question d'intérêt.

Après le côté spéculation est beaucoup moins répandu que cette idée de valeur refuge. Bref, dans le contexte économique actuel, on ne s'amuse pas vraiment à acheter un artiste peu connu en pariant qu'il sera connu ensuite. Ou en tout cas on ne le fait pas par intérêt financier uniquement, c'est un risque stupide qui n'a pas de raison d'être.

Si on veut s'enrichir grâce à des oeuvres, on achète du très connu. Pour prendre un exemple que tout le monde connait, lors de la vente du soir chez Phillips le 15 novembre 2012, un Mao de Warhol, sérigraphie avec des repeints d'acrylique, de dimension moyenne 127/106cm datant de 1973, relativement précoce mais pas non plus follement précoce, estimé entre 12 et 18 millions et s'est vendu 13,5 millions de dollars.
Un Mao c'est ça: Image

Et donc, des Mao, il y en a 10. Bref un dixième d'une série vaut 13,5 millions de dollars. Et ça pour le coup c'est une valeur sûre, encore plus que l'or. En fait si on faisait une histoire économique de l'art au XXe siècle, sa chronologie serait sans doute indexée sur celle des crises économiques mais pas dans un lien direct. En l'occurence, avec la crise actuelle, l'art ne s'est jamais vendu si cher. Après certaines autres crises ont vu un effrondrement du marché (comme dans les années 30 par exemple). En 38 Picasso fait une exposition de ses dessins cubistes et n'en vend pas un seul, pas un!

Aujourd'hui on a un marché de l'art à deux vitesses. Les artistes de renoms se vendent très bien, alors évidemment un Basquiat, un Richter ou un Picasso, ça s'arrache à des prix qui peuvent paraître aberrant. Par contre si on demande à des galeristes qui vendent des artistes plus jeunes (ou moins morts) comment se porte le marché, ils répondront qu'il se porte plutôt mal. Dans un contexte comme le notre, on ne s'amuse pas à spéculer. Du coup, ceux qui s'intéressent à des artistes qui en sont au début de leur production ou en tout cas qui ne sont pas encore connus le font de manière “désintéressée” au moins financièrement (ou alors c'est qu'ils ont vraiment le goût du risque).

Après croire que l'art contemporain n'a comme système de valeur que les fluctuations du marché c'est faux. J'aurais bien envie de vous parler du Kunstkompass. Je vais essayer d'être très rapide. Le Kunstkompass c'est un peu le baromètre de l'art. C'est un outil statistique mis à jour par un hebdomadaire allemand, Kapital. Tous les ans à l'automne paraît le top 100 de ce classement qui ne contient que les artistes vivants. Le monde de l'art se focalise de manière un peu fétichiste sur les 10 premiers.

Les journalistes du Kunstkompass travaillent d'une manière qui n'a rien à voir avec les montants des ventes aux enchères. Cela marche avec une liste qui est également actualisée tous les ans de lieux d'exposition dans le monde : la Tate, Beaubourg, le MoMa etc. Suivant le rayonnement et l'importance dont est supposé jouir le lieu d'exposition, y être vaut un certain nombre de points. Une rétrospective au MoMa vaut plus de point qu'une manifestation à la Biennale de Venise par exemple. Cette liste est un indicateur de la valeur d'exposition, quels sont les artistes les plus vus. Ensuite il y a aussi un certains nombres de points donnés selon les artistes plus commentés dans une année, avec donc variation de la notation selon qui en parle etc. Bref c'est un système complexe mais qui est plutôt pertinent.

Le premier Kunstkompass paraît en 1970-71. Cet indicateur n'a commencé à être considéré que dans les années 90, mais aujourd'hui il est un élément en tant que tel du paysage de l'art actuel. Bref c'est un exemple, le tout est de relativiser l'aspect financier.

Et puis comme vous êtes des petits curieux, je vous fais la liste des 10 premiers de la dernière édition (et comme vous manquez de jolies images, j'illustre même, mais pas tout, parce que ça passe pas!):

Gerhard Richter, allemand
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Claudius, 1986, Huile sur toile, 406 x 311 cm

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Confrontation 1, 1988, huile sur toile, 112 x 102 cm

Bruce Nauman, américain
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Humain, Need, Desire , 1983

Georg Baselitz, allemand
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Oberon (Remix), 2005, Huile sur toile, 300 x 250 cm

Rosemarie Trockel, allemande
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Sans titre, 1952

Cindy Sherman, américaine
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Untitled Film Still #3, 1977

Anselm Kiefer, allemand
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Sol Invictus, 1995

Richard Serra, américain
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Installation au MoMa

Mike Kelley, américain (bon lui il est un peu mort entre temps mais au moment du classement, il ne s'était pas encore suicidé)
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Olafur Eliasson, danois
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Sun in the Turbine Hall , pour la Tate, en 2003


Pipilotti Rist, suisse
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Capture d'écran d'une vidéo

Nomis a écrit :"si le but c'est de représenter un truc le plus fidèlement possible, ben ca sert plus à rien maintenant qu'on a des appareils photo" (oui je sais c'est complètement idiot)
En fait c'est tout sauf idiot, cette remarque tu n'es pas le premier à te l'être faite. Il y a eu un renversement des valeurs lorsque la photographie s'est démocratisée. En fait de base, quand la photographie a été rendue accessible au plus grand nombre, il y a eu cette espèce d'effervescence autour de cette invention avec l'idée que c'était l'art démocratique par excellence : la photographie par tous, et pour tous ! Quand je dis effervescence, ce n'est pas une exagération, ça a vraiment été quelque chose, une utopie démocratique. Et à partir des années 30 on a un inversement du système de valeur et peu à peu émerge cette idée que la photographie devient cette pratique aliénante car elle uniformise tout et ne peut être considérée comme un véritable art. Je schématise à fond hein, mais c'est pour dresser rapidement le tableau. Enfin bref, en France principalement (en Europe aussi mais bon je dis ça pour souligner l'opposition avec les États-Unis), on a assez mal vu l'arrivée de ce medium qui rendait toute reproduction instantanée et donc sans effort et surtout qu'on voyait sans intermédiaire donc d'une objectivité qui n'avait rien d'artistique.
Bref c'est quelque chose qu'on a reproché à la photo, si c'est pour reproduire quelque chose et c'est tout, sans effort, très facilement, sans avoir à maîtriser un savoir faire, et bien ce n'est pas de l'art.

Et on revient toujours à : qu'est ce que l'art ? Et juste pour compliquer encore la chose, je préciserais simplement que je ne vais pas dire ce qu'est l'art. Par contre je peux dire qu'un certain nombre d'objets qu'on présente aujourd'hui comme de l'art, et qui prennent place dans nos institutions et chez les collectionneurs, qui se vendent etc. ne sont pas du tout à la base des objets d'art : les statues antiques, les masques africains etc.

Bref, je ne répond pas à la question évidemment, je la complique encore plus. La suite au prochain épisode:wink :

Et ça c'était moi qui tentais de ne pas être longue...
Nomade
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Re: "L'art contemporain est nul" - Partie 1

Message par Nomade »

Effectivement, je n'attends pas une réponse unique et gravée dans le marbre, je me doute bien que ce n'est pas si simple. Mais des éléments de réflexion sont les bienvenus. Merci déjà pour les précisions sur le marché de l'art.

Et effectivement, je n'avais jamais réfléchi au fait que les masques africains ou les sarcophages égyptiens n'avaient pas été créés dans l'optique première de devenir des œuvres d'art. Ça paraît pourtant évident quand on y pense deux minutes...

Bref, vivement la suite, quand tu auras le temps.
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