Je n'ai jamais parlé d'étendre des notions juridiques valables entre humains capables de produire des propos intelligibles entre eux à l'ensemble du règle animal, ça serait ridicule. Comment parler de "devoirs" d'un animal dès lors qu'il est impossible de le lui apprendre ou presque, faute de langage en commun ?
Pour ma part je n'estime pas faire de l'anthropomorphisme, simplement j'ai de la compassion et je compte la pollution de CO2 incluse dans mes consommations, c'est tout. Donc je regarde dans le blanc de l'œil le processus d'élever une bête, fut-ce dans des conditions atroces ou moins (et quoi qu'en disent certain je pense que l'accès à de la viande élevée au grand air et au bon grain est une affaire de privilèges : le gros des troupes françaises ingurgite de la viande pas chère élevée en batterie), pour ensuite la zigouiller, et je trouve que me passer de ce procédé est souhaitable, par inférence de ma propre expérience sensorielle.
Pour ce qui est du CO2 et du simple coût industriel inclus dans l'élevage, les chiffres sont là et difficiles à nier. Si les chinois se mettent à consommer ne serait-ce qu'une pièce carnée tous les deux jours, les tensions mondiales sur les marchés des céréales (car il y aura des arbitrages à faire entre terres arables et denrées pour la consommation animale ou humaine) seront proprement atroces, et aboutiront à des flambées alimentaires sources de nouvelles émeutes de la faim. C'est d'ailleurs sans doute ce qui va se produire, tant il est immanquable de constater une corrélation désastreuse entre proportion carnée d'un régime et accès à un niveau de vie supérieur. Sans doute qu'il faudra en arriver à une catastrophe durable de ce genre pour se décider à faire marche arrière. Si une consommation durable de viande par le milliard et demi de chinois s'installe dans le temps et n'est pas résorbée naturellement par le choc des prix, l'impact environnemental qui va s'en suivre sera lui-même assez désagréable à regarder. Rien qu'aujourd'hui l'élevage représente une pollution carbonée supérieure au transports, dans le monde. Mettez de la viande dans 1 500 000 000 assiettes chinoises et vous verrez la qualité de l'air que vous allez respirer.
Notre mode de vie carné est impossible à généraliser à l'échelle planétaire, dès lors bouffer de la viande comme de rien devient à mon sens un chouilla irresponsable et égoïste.
En fait je ne vois pas trop ce que l'accusation d'anthropomorphisme vient faire là. Je ne pense sincèrement pas que de dire que les conditions de privation de liberté et d'inconfort de l'élevage en batterie constituent un stress pour les animaux d'élevage soit de l'anthropomorphisme. Ni de dire que devant l'éventualité explicite de la mort, ils choisissent d'un acte plein et libre de vivre. Il s'agit plutôt d'observations étayées. Vouloir épargner ça aux animaux parce-que je présume que pour leur esprit ces événements sont intolérables, vous pouvez appeler ça de l'anthropomorphisme si vous le souhaitez, mais je doute fortement que ça soit légitime, puisque ça revient à destituer les vertébrés supérieurs que nous consommons de toute conception de refus de la mort, de conception de leur propre douleur, d'aliénation face à l'enfermement. Ca me parait être une hypothèse très forte.
Le contre-argument de la prolifération des espèces endémiques sans prédateurs autres que l'homme désormais est intéressant, et de poids. Le sanglier et le chevreuil constituent aujourd'hui des menaces écologiques sérieuses pour les éco-systèmes européens. C'est à creuser, je n'ai pas de contre-expertise valable en la matière.
WillTMG, je regrette que tu estimes que le rapprochement des conclusions "naturalistes" sur le bien-fondé de la consommation carnée et sur le bien-fondé exclusif de l'hétérosexualité n'a aucune pertinence, pourtant ça n'est pas mon avis. A mon sens, si les conclusions rapprochées concernent deux choses radicalement différentes, le système de pensée qui aboutit à ces deux conclusions est bel et bien le même : si c'est l'étude de la nature qui doit devenir par inférence source de loi, cela aboutit à des contradictions patentes avec l'état actuel de notre morale, y compris et surtout vis-à-vis du droit des minorités, quelles qu'elles soient, qui sont par nature vulnérables, et dès lors potentiellement l'objet de menaces par le groupe dominant. Si l'observation de la nature devait être notre source de droit, je ne vois pas sur quel autel on sanctifierait la défense des plus faible, la protection des enfants, la criminalisation de l'usage de la force et de la violence, et en fait la désactivation de tout processus d'élimination par tout groupe susceptible de le provoquer sans être interrompu, que ce soit la nature, ou tout groupe humain ou animal.
Je n'accepte pas ce prémisse "nous sommes fait comme ça, c'est qu'il y a une bonne raison". Il fait état d'un statisme radical ("nous sommes fait comme ça", comme si ça devait être immuable), alors que l'effort civilisateur est au contraire tout de remise en cause de l'instituant, de redistribution des carcans qui n'ont jamais rien eu d'atemporel. L'homme est un être libre qui détermine seul ce qu'il devient. La compatibilité de sa physiologie avec la consommation de viande n'est pas quelque chose qui a vocation à être exercé de façon irrévocable, pour peu qu'on le décide. Une société est pleinement libre d'estimer que l'abattage d'animaux n'est pas moralement souhaitable, et s'abstenir d'en consommer. Une considération du type "on est omnivore, y'a bien une raison" n'est nullement en position d'y faire échec, la "raison" invoquée n'étant rien d'autre que le hasard évolutif. Cette posture de refus d'un ordre "naturel" qui serait immuable et établi et qui serait de facto l'horizon indépassable de ce qui est moralement acceptable ou non, cette capacité à dépasser l'horizon de l'ordre primaire
reçu, pour façonner soi-même un ordre secondaire
décidé et voulu, c'est ce mouvement de fond qui constitue l'acte de prise en main de son propre destin de la part d'une société humaine, et c'est un élan dont nous nous regorgeons d'être capables. Si les conclusions en terme de respect et de tolérance de l'homosexualité, et d'inacceptation de l'élevage industriel de bétail sont très distantes en termes d'objets, en revanche le principe auquel elles font obstacle est le même : le refus qu'une observation de l'état de la nature, de ce qui aurait reçu l'onction de "l'immuable" fasse office de Loi entre les hommes ou entre eux et leur environnement. L'état de fait indépassable et qu'il faut ménager, ça n'est pas que l'homme soit ou non disposé à manger de la viande animale, c'est que l'homme comme l'animal souffrent. Et qu'à ce titre, il y a incohérence à reconnaître la souffrance humaine et à tout faire pour l'éviter, tout en l'infligeant au reste du monde animal sans considération. Si ce biais constitue l'anthropomorphisme, je l'accepte, tant l'autre biais, celui d'ôter à l'autre animal son droit au refus de souffrir et mourir pour autre chose que l'exercice de sa liberté, m'est insupportable.
A ce titre, j'entends être cohérent : la chasse d'un animal jusque là libre m'a toujours nettement moins choqué que l'élevage d'un animal depuis sa naissance qui n'aura jamais rien connu d'autre. La chasse peut d'ailleurs s'avérer nécessaire pour protéger les éco-systèmes que l'homme a privé de ses autres super-prédateurs.
Pour en revenir à ta remarque sur ce que j'ai répondu à Imaginary, c'est absurde. Je ne l'ai pas envoyée chier parce-que j'étais sûr de ma supériorité. Mais parce-que l'autorité qu'elle montrait dans cet acte de classer les gens selon son bon vouloir était totalement disproportionnée en rapport de ce qu'elle venait d'apporter comme contribution à ce débat. J'aime que les gens répondent et se justifient de ce qu'ils avancent. Je déteste qu'on achève un dialogue en assénant : "les choses sont naturellement comme cela, ça fige toute posture ultérieure possible, POINT" (car elle a eu l'audace de finir sa phrase par "point").
zigomio a écrit :je ne connais pas assez bien se végétal pour t'en parler mais je peux mais jepeux te parler deux " réaction " qui sont lié:
le sapin ( et tout les conifère ) quand il A UNe branche de couper il réagis en produisans de la sève qui peut être comparer aux " croute " que tu te fais quand tu te coupe.
exemple encore plus flagrant : l'herbe. je sais pas si tu a déjà fait attention mais quand tu coupe de l'herbe elle repousse plus densément pour la simple raison qu'elle se " dit" ( même si ca parle pas hein
) que si elle deviens plus dense elle pourra mieux resister a son environnement
alors certe ton épi de maïs ou ta salade si tu la coupe au pieds elle ne " souffrira " pas mais c'est un peux comme si on te coupais la tête hein mais arrache les feuilles de cette dite salade et tu verras qu'il y aura une réaction de d" défense " ou d'adaptation
certe c'est vrai qu'un brin d'herbe ne montrera pas qu'elle souffre comme peux le faire une vache ou même un homme mais je peux t'assurer qu'un végétal peux souffrir
C'est certes assez tiré par les cheveux à mon sens de comparer le processus de cicatrisation du sapin qui cicatrise sa plaie à de la souffrance animale. Déjà ce que tu décris est un mécanisme de cicatrisation / défense, pas une manifestation de douleur. L'équivalent de la sève du sapin serait la coagulation du sang chez l'animal, mais pas la douleur en tant que telle.
La douleur en tant que telle c'est l'interprétation des stimuli nociceptifs et la détresse envoyée à l'esprit pour motiver le retrait. Encore un fois, on tourne en rond, mais il n'y a rien de tel chez une plante. Cicatriser ça permet de survivre, mais ça n'est pas symptomatique de l'existence d'un stimulus douloureux en amont.
Enfin et surtout, ton raisonnement est totalement faux pour la cueillette des fruits (au sens large) : le fait que le fruit mûr tombe fait partie du cycle végétatif naturel de la plante, et à ce titre n'est en aucun cas analysé par sa physiologie comme une amputation. Donc prélever la pomme, l'orange ou la courgette, on ne peut décemment pas dire qu'indirectement on soupçonne que c'est une amputation source de douleur pour la plante, c'est absurde.
Pour les plants que l'on cueille intégralement comme le maïs ou le soja, ce contre-argument devient inopérant, mais à titre personnel le premier paragraphe de réponse sur la confusion entre processus de cicatrisation et influx de douleur me convainc nettement.