Il était bien temps car ce film date de 2011 mais j'habite une petite ville de Province.
Je signale ce film car un film marocain qui nous parle si bien de ces petites mains qui travaillent à nous décortiquer les petites crevettes qu'on retrouve ensuite à la vente chez nous ou qui travaillent là-bas dans le textile, c'est assez rare.
On suit donc le quotidien de Badia cette tangéroise fille-crevette aimable comme un chiffon (dixit sa logeuse, qui n'a pas vraiment tort), de son amie et collègue Imane et aussi d'Asma et Nawal, qui en dehors de leur labeur quotidien, en petites bricoleuses de l'urgence « travaillent les hommes et les maisons vides ».
« Fille-crevette », c'est le bas de l'échelle : surtout à cause de l'odeur qui ne s'en va jamais. Régulièrement, Badia se lave, s'enduit d'une pâte parfumée, se frotte comme si elle voulait provoquer une mue. Changer de peau, de vie, elle en rêve : les yeux rivés sur la nouvelle zone franche, où se sont installées les industries textiles, boulots plus nobles et plus rémunérateurs. En attendant, avec sa copine Imane, elle multiplie la nuit les trafics en tous genres : elles monnaient leur compagnie, leur corps, à des hommes qu'elles volent au passage...
[youtube]0sI0EpJ4IOU[/youtube]Toujours en mouvement. Badia ressemble à la « Rosetta » des frères Dardenne qui marchait, marchait pour ne pas tomber. Avec un atout de plus : la tchatche. Badia parle l'argot du coin, un drôle d'arabe cahoteux, particulièrement guttural. Cet idiome, elle le tord en un slam vigoureux, qui lui sert au moins à recouvrir sa vie d'un voile poétique. Transformer son existence par les mots : ainsi se dit-elle « sur la planche » d'un plongeoir d'où elle s'élancerait...
Les quatre personnages principaux (Badia et Imane croisent un duo de concurrentes qui pourraient devenir des complices) sont joués par des non-professionnelles à l'incroyable présence.