Ca commençait plutôt bien, dans une maison du Nouveau-Mexique version années 50, avec le père d'Elise qui la bat parce qu'elle voit des effets spéciaux mais pas à la TV. C'est un brave type, ce Gérald Rainier. Il aurait plu à Eric Zemmour. Enfin un papa qui a de l'autorité dans sa maison ! Je rigole mais les quinze premières minutes du film ont limite rien à voir avec le reste du film. Ca aurait pu être vachement chouette d'y rester, dans les années 50 ! Surtout que dans ce chouette passé, il y avait plein de nouveaux personnages et nouvelles ambiances à explorer : une maison placée à deux pas d'une prison, une gamine qui parle aux détenus décédés, un père géolier, une desperate housewive bien coiffée, et un gamin qui fait pioupiou avec son sifflet. Non et puis c'est pas comme si Lin Shaye se faisait vraiment vieille, et que c'est un peu ballot quand ton quatrième film se passe chronologiquement AVANT ton premier film.
Mais passons. Parce que le problème du film est un peu plus grave que la vieillitude d'Elise.
Dans les années 50, on nous montre que la jeune Elise libère un esprit malveillant du "lointain" (ou "très loin", "plus loin", ça dépend des films ou des dialogues), en ouvrant la porte rouge qu'on voit dans tous les films, aka la frontière entre le "lointain" et notre monde. Sauf que jusqu'à maintenant, toutes les entités n'ont pas eu besoin qu'un humain vienne lui ouvrir la porte rouge pour nous faire chier dans nos barraques. Dans les trois premiers films, ils circulent aisément entre les deux mondes. Alors on va me dire que dans le premier film, Darth Maul et ses amis ont attendu que Dalton passe la porte rouge pour organiser une jumpscare party chez les Lambert. Sauf que dans le dernier arc du film, et rebelote dans le deuxième film, le corps astral de Josh rencontre des esprits AVANT de passer la fameuse porte rouge. Et histoire d'enfoncer le clou, dans le troisième film, il suffit que Quinn tente de contacter sa défunte mère via une séance de spiritisme chez Elise pour qu'elle se retrouve emmerdée par Psycho Mantis.
En fait, la porte rouge, c'est juste la porte d'entrée de la demeure du méchant de l'épisode. Et le lointain, bah... ça a du avoir du sens sur le papier, mais à y réfléchir, quand Elise dit que Dalton est "allé tellement loin dans le lointain qu'il s'est égaré", par exemple, bah le gamin est juste monté au grenier, en fait. Je sais pas. Pour moi, un truc loin, c'est genre la Chine ! Pas les WC sur le même palier que ma chambre ! Je rigole, mais je ferais sans doute moins le malin quand je serais vieux comme Elise !
"Putain que c'est loin, les WC !"
Et donc, pour en revenir au film, y a un gros problème de gestion du plan astral "lointain", qui a le pouvoir de s'y projeter ou pas, qui peut voir et franchir la porte rouge. Et ce problème, il va être porté par deux personnages dont on avait pas vraiment besoin : les nièces d'Elise. Imogen et Melissa, en plus d'avoir des prénoms atroces, se retrouvent comme par magie dans le même bar PMU de la ville où Elise a décidé de grignoter une salade. Une conversation entre inconnus complètement téléphoné, et des retrouvailles tout aussi téléphonées quand le frère d'Elise débarque, ça commence bien. Mais on en est au 4me film, utiliser une carte Deus Ex Machina pour faire avancer l'intrigue est plus ou moins autorisé à ce stade. Une séquence téléphonée plus tard, tout ce beau monde se retrouve à errer dans la vieille maison familiale, pour le fun, jusqu'au moment où Melissa tombe nez à nez avec l'esprit malfaisant. Après deux-trois tours de clés dans le gosier de la donzelle, il emmène son corps astral avec lui "dans le lointain". Pendant que le corps pas astral de Melissa est emmené aux urgences par Papa, Imogen décide de rester aider Tante Elise, parce qu'elle aussi peut voir les esprits et aller "dans le lointain" !!!!! Dans les faits, à part échanger des scènes de drague avec Specs, elle sert à rien, et c'est pas donner un sifflet à Elise pour appeler sa défunte mère à l'aide et envoyer valser l'esprit malveillant qui va me convaincre de sa grande utilité. Dans les faits (bis), si on s'en tient à ce que nous dit Imogen, on peut en déduire que Melissa n'a pas de don. Donc toute cette histoire de kidnapping ne tient pas debout.
Cela dit le coup des clés dans le gosier de Melissa, c'était plutôt joli.
Bref, ça me gène un peu tout ça. Non parce que s'il suffit d'un trousseau de clés pour "avoir le don" d'aller "dans le lointain", bah ça ruine tout, en fait. Josh qui parce qu'il a un don va sauver son gamin ayant lui aussi un don, ça avait du sens. Et pour finir sur Josh, les seuls moments où l'expression "aller dans le lointain" a eu du sens, c'est quand il a effectué une certaine distance d'une maison à une autre pour franchir les portes rouges où se trouvaient respectivement Darth Maul dans le premier film, et la demeure de la Mariée en noir dans le deuxième. En comparaison, le concept de l'upside down dans Stranger Things, c'est vachement plus simple et cohérent.
Dernier point pour la route assez gênant, bah c'est Sinister. Encore une fois, sur le papier, un esprit qui se nourrit de la haine des hommes pour gagner en puissance et mieux les dominer, pourquoi pas. Dans les faits, cette intrigue est beaucoup plus difficile à suivre que celle du deuxième film dans la mesure où Sinister n'a pas véritablement de poids, noyé dans la masse comme il est. On focalise notre attention sur le père d'Elise, puis le nouveau résident de la maison, puis on nous balance des nièces avec ou sans don, un frère qui cherche son sifflet, et ça part un peu dans tous les sens sans que le film prenne le temps de poser calmement son fil rouge, sans que des histoires secondaires ne viennent empiéter dessus. Alors quand dans son dernier quart à peine, on nous montre Sinister, c'est un peu difficile de s'intéresser à son cas. Je veux bien qu'Elise jeune le libère et qu'il prenne possession de gens comme Eric Zemmour depuis, je veux bien qu'Elise et son frère aient quelques difficultés à recoller les morceaux et qu'on se serve des nièces comme proxi, mais y a beaucoup trop de personnages introduits dans ce film pour au final pas avoir grand-chose à dire sur eux. Ca ne tiendrait qu'à moi, on serait restés dans les années 50, Sinister aurait franchi la porte rouge pour rejoindre notre monde, et il aurait causé deux trois bricoles dans la prison juste à côté. Une prison, pour un esprit bouffeur de haine, devait y avoir l'embarras du choix !