Hier soir, entre deux films de Clive Barker, j'ai regardé le premier épisode de Gaycation.
Mais c'est quoi ?
C'est le documentaire/road trip d'Ellen Page et son meilleur ami chez les LGBT à travers le monde : Japan, Brazil, Jamaica, Ukraine, India, on sait maintenant quelles types de vacances et de destination on peut se payer quand on joue le passe-muraille dans X-men.
Garanti sans effets spéciaux !
Et c'est bien ?
J'étais un peu sceptique en regardant les premières séquences. Ca transpirait un peu trop le voyeurisme et le tourisme pour daigner s'intéresser aux commentaires qu'on nous sort. Oui, Ellen Page est lesbienne, tout comme son meilleur ami est gay, donc ils se baladent dans des coins de Tokyo la nuit pour rencontrer et interviewer la communauté LGBT dans des bars et lieux dits. C'est sans doute là que le montage fonctionne le mieux : ça paraît très anecdotique et dispensable au début, pour mieux nous confronter à la réalité de la situation au fur et à mesure que l'on avance dans ce qui se transforme en une véritable enquête (toute proportion gardée, ce n'est pas une journaliste non plus). Ce n'est pas juste "Ellen Page vous montre les bars branchouilles ou les endroits tendances de la capitale" ou une énième émission graveleuse animée par Evelyne Thomas.
Là où ça commence à faire tilt, c'est quand les propos des propriétaires ou des clients font echo à notre propre vécu. "Avant, cette rue, c'était rempli de prostituées", "Ce lieu secret est fréquenté par une majorité d'hétérosexuels", "C'est ici que certains transsexuels viennent se retrouver et commencent leur transition", "Un bar lesbien et c'est tout". Et de là, il ne s'agit plus de savoir où se cachent les pédés et les goudous, mais bel et bien de comprendre c'est comment de vivre en tant que LGBT au Japon.
Bien sûr, on n'a pas attendu l'actrice pour savoir que la question était tabou, on a tous entendu parler de l'attrait des hétérotes pour les yaoi, ou encore du phénomène des mariages blancs. Cela dit, entendre de la bouche d'un bouddhiste que du point de vue de la religion, ça ne pose pas de problème, assister à une séance de karaoké un peu spéciale avec des "filles pourries" (Fujoshi), discuter avec des avocats spécialisés dans les discriminations ou une politicienne pro-LGBT, il fallait quand même le faire.
Là où ça reste le plus marquant, c'est quand on nous explique qu'il existe des sociétés proposant aux LGBT de louer un ami dans les moments difficiles (ou pas). Dans le cas présent, un fils faisant son coming-out à sa mère. Un gros plan sur la réaction de la mère après l'annonce, fini l'ambiance vacances/roadtrip, on est très mal à l'aise, enfin Ellen et son pote se sentent un peu gêné d'être là (et c'est tout à leur honneur, malgré l'ambiguïté de l'acte, hein), et il faudra toute l'adresse de "l'ami" pour faire revenir la mère auprès de son fils et faire face à ce guet-apens médiatisé.
Donc on regarde ?
Si en tant que goudou vous êtes ravie qu'Ellen Page ait fait son coming out, oui. Si Ellen Page vous fait ni chaud ni froid, reste encore à savoir ce qu'elle et son meilleur ami ont à nous dire sur les autres pays visités en saison 1 et 2. Et à condition surtout que l'exercice reste ce qu'il est : une actrice outée nous servant de proxi pour se poser 2 ou 3 questions relatives aux communautés LGBT un peu partout sur le globe.